Bocaranga 17 janvier 2014 – le jour
de la plus grande détresse. Depuis ce matin les derniers qui n’ont pas fui de
la ville cherchent à partir. Le quartier des musulmans se vide assez
rapidement. Les autres quartiers depuis quelques jours sont déjà désertiques. Vers
midi ne reste que quelques personnes. Les marchandises sont chargés dans des
camions et envoyer ailleurs. Vendredi jour de marché hebdomadaire. D’habitude
de 5h00 du matin la défilée des femmes et des hommes qui se dirigent à la place
du marché. Aujourd’hui on ne voit que des Seleka, armés plus que d’habitude.
Vers 9h00 au marché je trouve vingtaine de personnes avec quelque cuvette de
manioc, quelque tas de patates douces, un peu de haricot, c’est tout. Rien d’autre.
Plus encore 2 Seleka fouillent des sacs de quelqu’un. J’ai leur fait une remarque
de ne plus faire cela ici au marché. Je
demande que ce qui ‘ils cherchent. Mais ils ne comprennent pas, ils ne
parlent pas sango (langue nationale de la RCA). Un d’eux il fait sortir de sa
poche une grenade et il me la fait voir. Pour faire la peur ou quoi ? Je
leur dit de laisser les gens en paix, de partir là d’où ils viennent. On se
sépare malgré tout en paix.
Vers 10h00 je circule avec une
petite moto dans les quartiers. Vraiment, peu des gens, un ou deux ici et là.
Vide. Désert. Je vois quelques personnes en tenue de civile avec des kalaches
au bras. Que font-ils au quartier ? Pour quoi faire ? Quel but ?
Ce ne sont pas des Seleka. Certains quartiers de Bocaranga c’est la poudrière
selon certains. Est-ce vrai ?
Vers 11h00 j’apprends que quelques
militaires ont pris en ville la voiture des sœurs. Seleka. Je pars vers la base
de Seleka et j’expose le problème. Ils sont surpris d’entendre que quelqu’un
d’eux a osé voler la voiture. Ils me disent qu’ils vont la chercher. Je pars en
moto au quartier Haoussa, là où ils ont fait sortir le chauffeur de l’auto.
Après quelques minutes en sillonnant au quartier je trouve la voiture avec 3
personnes dedans. Seleka. Bien sûr avec des kalaches. Je réclame la voiture,
mais ils me regardent avec un mépris. Leur chef restait à coté de voiture et parlait au téléphone.
Parlait arabe, arabe tchadienne. Il y a quelques années, j’ai vécu 4 ans au
Tchad, heureusement je sais reconnaitre arabe tchadienne. Enfin ils me disent
de partir à la base pour récupérer l’auto. Eux ils montent, moi j’attends, dès qu'ils prennent la route vers la base je les suis. Il y a un peu de chance et d’espoir. A la
base 20-25 Seleka. On commence à discuter, ils ne veulent plus donner la clé de
voiture. Ils disent qu’il y avait un accident 35 km d’ici et ils veulent aller
chercher des blessés. Même si certain connaissent sango, ils me parlent en
arabe. Je sais qu’ils cherchent à fuir de chez nous, mais ils n’ont pas de
moyens, ce pour cela ils s’en prennent aux autres. Apres 15mn de discussion
lorsque j’ai fait sortir mon téléphone pour faire un appel ils désistent et ils
me donnent la clé. Le chauffer est là, il démarre et on part à la maison. En
plus ce jour les Seleka ont volé (réquisitionner) 3 motos.
Chez
nous, à côté de la maison on compte des déplacés. Un millier. Des hommes,
femmes et enfants, chacun avec un petit sac de nécessaire, une natte ou un
matelas. Il y a de l’eau à boire, les
latrines pour les besoins, on peut prendre la douche. Heureusement. Les gens
par terre sur les nattes, les enfants s’amusent, les hommes discutent. Les
jeunes filles préparent à manger. Voilà le partage de taches.
13h00
quelqu’un m’appelle disant que dans un quartier on voit la fumée, probablement
les maisons incendiées. Je cherche à partir, mais devant notre maison un grand
mouvement. Les gens qui étaient installés dans les salles fuient dans notre
concession. Tout d’un coup je vois une cinquantaine des Anti-Balaka qui passent
devant moi et se dirigent vers l’autre quartier. Demi-tour et à maison. L’attaque
commence. Après 5 mn on entend des tirs de l’arme automatique, des fusils, des
obus. Cela dure 1,5h. Continuellement. Après de temps en temps. Jusqu’à 18h00.
Des femmes et des enfants entassés chez nous sur les vérandas (400-500
personnes). Cachés à l’abri de balles perdues. Le soleil se couche, la nuit
tombe, chacun cherche à s’installer pour la nuit. Insécurité, incertitude
règne. A voix basse on échange des infos actuelles, mais en vérité on n’en sait
pas trop. A 21h00 – extinction de la lumière. La lune apparait. On essaye de
s’endormir, mais, mais avec quel résultat ? Pendant la nuit on entend
encore des tirs. Le matin aussi. Jusqu’à quand?
Robert
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